Forum européen : culture vs austérité

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FORUM EUROPÉEN

"La culture nouvelle commence là où le travailleur et le travail sont traités avec respect" (Maxime Gorki)

L’austérité frappe durement les peuples d’Europe, aggravant la pauvreté et fragilisant les travailleurs. Notre modèle social européen, âprement conquis par le mouvement ouvrier, est mis à mal. Les budgets culturels ne sont pas épargnés, entraînant des difficultés pour les institutions culturelles (musées, salles de spectacles...), la disparition de manifestations culturelles, la précarisation croissante des artistes... L’extrême-droite se renforce, la xénophobie et les intégrismes grandissent. De graves menaces pèsent sur la démocratie, les droits et les libertés politiques. À ce processus... agressif, nous opposons les fondements d’une société plus juste, plus égalitaire, plus libre, plus solidaire : la protection sociale, les services publics, l’éducation... et la culture émancipatrice. Contrairement à la culture « marchandisée », à la « culture fastfood », elle est aussi un moyen essentiel de résistance. Ce forum se propose d’ouvrir la réflexion, le débat et le partage de toutes les alternatives mises en œuvre en Europe pour défendre ce bien commun irremplaçable.

Programme:

Vendredi 5 février

16:30 - Accueil
17:00 - Plénière (exposés et débats)
19:30 - Dîner
20:30 - « Karl Marx, le retour » de Howard Zinn (spectacle du Théâtre des Rues par Jean Delval)

Samedi 6 février

9:00 - Ateliers
12:00 - Pause de midi
12:30 - Plénière (rapports, débats et conclusions)
14:30 - Fin
 

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Privilégier la voie diplomatique et préserver nos droits et libertés !

Le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l’orage (Jean Jaurès)

Une semaine après les attentats criminels de Paris et quelques jours après la sanglante prise d’otages de Bamako (Mali), la tension reste à ce point élevée que le niveau d’alerte est rehaussé à Bruxelles depuis samedi pour « parer à une menace imminente ».

Face à la menace terroriste, il importe évidemment de prendre toutes mesures nécessaires pour protéger la population. La gravité de la situation ne doit cependant pas empêcher la réflexion politique tant sur les causes de cet état que sur la manière belliqueuse qui a été choisie pour gérer la crise. Jaurès disait aussi qu’on ne fait pas la guerre pour se débarrasser de la guerre.

Des remèdes pires que le mal.

Les responsabilités occidentales dans la déstabilisation de ce Moyen-Orient tellement fragile doivent être rappelées : que ce soient celles des USA et de George W Buch, le menteur, en Afghanistan et en Irak ; que ce soient celles de Sarkosy et de Cameron en Libye ; que ce soient celles d’Obama, de Hollande et Cie en Syrie… A cela, on peut ajouter leur complaisance coupable vis-à-vis de la politique colonialiste d’Israël dans les territoires palestiniens ou bien encore leur hypocrisie à l’égard des pétromonarchies arabes. Les droits de l’Homme et de la Femme pèsent bien peu par rapport au baril de pétrole et au business des armes. Partout les logiques de guerre encouragées par l’OTAN ont eu pour conséquences la prolifération des armes et le renforcement des djihadistes.
De nombreux spécialistes en stratégie militaire considèrent que 1° le terrorisme ne sera pas vaincu par des actions militaires ; 2° les bombardements n’ont d’autres effets que de massacrer des milliers de civils innocents et d’engendrer les monstres que les occidentaux prétendent combattre.
Il importe donc que cesse rapidement ce processus belliqueux infernal et que la politique, la diplomatie et la coopération dans l’intérêt prioritaire des peuples viennent enfin à l’avant-plan des relations avec le Moyen-Orient.

Combattre les inégalités et l’austérité mortifères.

Ainsi donc, selon les dirigeants européens tels François Hollande, pour justifier l’effort de guerre qui aggravera immanquablement les déficits budgétaires, « le pacte de sécurité prévaut sur le pacte de stabilité », ce dernier entendant réduire les déficits par des compressions budgétaires dans le secteur social, les services publics, la santé… Le gouvernement Michel ne dit pas autre chose, lui qui sabre à tour de bras dans tous les budgets utiles à la population, démantèle les services publics, exclut les chômeurs… Motus et bouche cousue à la Commission européenne et de tous ceux qui ont refusé de donner au gouvernement grec les moyens de mener la politique de lutte contre la crise humanitaire pour laquelle il avait été démocratiquement élu. Si c’est pour éviter des morts, nos gouvernants doivent savoir que la misère entraine aussi son lot de victimes.
Il serait inacceptable que ces dépenses d’armements consenties ne soient le prétexte à de nouveaux sacrifices pour les travailleurs et leurs familles ou encore pour laisser la misère les plus démunis s’aggraver. Les travailleurs ont entièrement raison de poursuivre leurs actions. Pas de trêve sociale avec les va-t-en guerre du gouvernement !

Pas de Patriot act chez nous !

À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles, entend-on dire. Certes la brutalité et la détermination aveugle des terroristes nécessitent des moyens de prévention rigoureux pour protéger la population. Elle les réclame et elle y a droit. Toutefois, il ne peut être question de profiter de cette situation exceptionnelle pour restreindre les libertés démocratiques et particulièrement les libertés syndicales. Ce n’est pas faire un procès d’intention au gouvernement Michel de le souligner car nombreuses sont les voix au sein de la majorité qui se sont prononcées ces derniers mois pour limiter certains droits , comme le droit de grève. La lutte contre le terrorisme ne peut en aucun cas justifier la mise en application des menaces d’un Bart De Wever ou Jan Jambon.

Enfin, plus que jamais, le dialogue avec la population musulmane doit être privilégié à la stigmatisation xénophobe. De même, le droit d’asile doit rester un droit absolu.

Bruxelles, 21 novembre 2015.

Le Comité central du Parti Communiste Wallonie-Bruxelles

 

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Le Parti communiste condamne les attentats de Paris

Le Parti Communiste (Wallonie Bruxelles) condamne avec force les attentats perpétrés à Paris ce 13 novembre contre des civils innocents et présente ses sincères condoléances aux proches des victimes de cette l'abominable tuerie. 

Le Parti Communiste rappelle que les interventions militaires meurtrières menées sous l’égide de l’OTAN en Afghanistan, en Libye, en Irak, en Syrie … n’ont fait , en plus de milliers de morts innocents, qu’attiser les haines et renforcer le pouvoir des mouvements terroristes.

Le Parti Communiste estime que nos gouvernements doivent impérativement et sans délai revoir leur politique bienveillante à l’égard de pays qui, tels l’Arabie Saoudite et le Qatar, soutiennent les terroristes en les finançant. Parallèlement, nos gouvernements doivent s'engager dans une véritable politique de développement du tiers-monde.

Le Parti Communiste aspire comme à l’accoutumée à un monde en paix et continuera à mener le combat contre la haine, la violence, le racisme et le fascisme, fruits du capitalisme.

Bruxelles,  le 15 novembre 2015

 

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L'invité du Drapeau Rouge : Bahar KIMYONGUR

Militant endurci de la solidarité internationale, né et éduqué en Belgique où il est licencié en histoire de l’Université libre de Bruxelles, Bahar Kimyongür n’a jamais oublié ses racines arabo-turques ni la conviction que ces racines le rapprochent, par un mécanisme de vases communicants, à tous les peuples en lutte. Opposant déterminé au projet de démantèlement de la Syrie concocté par une alliance trouble de l’impérialisme occidental, du sionisme et de l’obscurantisme islamique avec la complicité ouverte du régime turc, pourfendeur de la manipulation de l'information par les grands médias,  notre invité nous livre ici quelques vérités qui nous aideront à mieux comprendre la tragédie en cours dans ce grand et ancien pays.

Le Drapeau Rouge.- La dernière Assemblée Générale des Nations Unies a eu comme sujet central, pour ce qui concerne la politique internationale, la crise syrienne. L'intervention la plus remarquée fut celle du président russe Vladimir Poutine qui a proposé, à cette occasion, la constitution d'une coalition internationale pour combattre Daech (connu également comme l'État Islamique). Que penses-tu de cette proposition ?

Bahar Kimyongur.- Logique et nécessaire. La solution russe est la seule qui tienne la route. D'abord parce que contrairement à l'Occident, Moscou s'appuie sur des troupes au sol, à savoir l'armée syrienne, soit la force la plus légitime, la plus aguerrie et la plus efficace dans le combat anti-terroriste. Nul ne peut gagner une guerre en se contentant de larguer des bombes depuis le ciel. La Russie dispose de troupes au sol, celles de l'armée syrienne. L'armée syrienne dispose d'un appui aérien, les Sukhoi russes. Cette alliance militaire est la seule qui puisse sauver la Syrie. 

Ensuite parce que la Russie est l'unique nation à apporter une solution constructive pour les Syriens. L’intervention russe sollicitée par le gouvernement légitime de Damas est assortie d’un volet politique incluant toutes les forces syriennes de bonne volonté,  y compris les factions dissidentes de l’Armée syrienne libre (ASL) ainsi que des puissances régionales essentielles pour la résolution du conflit, telles que l’Iran et l’Égypte. Rappelons au passage que l’Égypte et la Syrie sont deux sœurs jumelles de longue date. Du temps de Nasser, elles ont formé la République arabe unie entre 1958 et 1961, se sont battues côte à côte contre Israël, notamment en octobre 1973, et contre les Frères musulmans. Les armées syrienne et égyptienne n’ont jamais rompu leurs relations même au plus fort de la crise syrienne. Et par ailleurs, l’une et l’autre sont des alliés historiques de l’URSS et aujourd’hui de la Russie (malgré l’américanisation promue par Sadate, Moubarak et Morsi).

À l’inverse, les USA et leurs alliés arabes, turc et européens n'ont fait que souffler sur les braises, armer directement ou indirectement Daech, ces ignobles barbares engendrés par les obscurantismes. De sorte que l'on peut affirmer qu'en soutenant l'effort de la résistance syrienne au terrorisme, la Russie devient un facteur essentiel pour la stabilité de la région et ce, tout en respectant la souveraineté du pays. Cette précision est particulièrement importante parce que l'intervention russe, à la différence de celles de la France et des États-Unis, est faite avec l'accord et l’acceptation entière du gouvernement syrien. La Russie défend les intérêts du peuple syrien. On voit bien que le chaos engendre Daech. Reconstruire l'État syrien là où les djihadistes l'ont anéanti est la condition sine qua non pour le retour à la paix, à la stabilité et à la réconciliation. Cela dit, Moscou sait très bien que la solution ne peut être exclusivement militaire. C'est pourquoi Poutine et Lavrov, le ministre des Affaires étrangères de la Russie, travaillent d'arrache-pied pour lancer un processus politique. Ils invitent les puissances régionales laissées sur la touche, comme l'Égypte et l'Iran ; ils invitent l'opposition non armée et même les reliquats de l'Armée syrienne libre. La Russie est donc le seul pays qui a un projet global. Elle se comporte vraiment en pays ami du peuple syrien.

Le DR.-  Pourtant, quelques jours après, faisant cavalier seul, la Russie se lance dans une campagne de bombardements aériens contre les forces islamistes. Cette décision soulève deux questions : premièrement, est-ce là le constat d'échec de l'appel de Poutine pour former une large coalition comprenant aussi les USA et l'Arabie Saoudite ?

La Russie ne fait pas cavalier seul. Elle est appuyée par des milliers de soldats iraniens, de combattants du Hezbollah, de volontaires irakiens ainsi que par des centaines de Palestiniens de citoyenneté syrienne. Moscou a l’expérience de la guerre et de la victoire. N’est pas maître aux échecs qui veut. Sa dernière défaite militaire face à l’axe américano-djihadiste en Afghanistan remonte à plus d’un quart de siècle. Depuis, la Russie a eu le temps d’apprendre de ses erreurs et de tisser des alliances stratégiques régionales durables.

Le DR.-  Deuxièmement, ces bombardements ne risquent-ils pas de susciter une vaste opposition qui donnera aux Russes le profil des agresseurs « mécréants » (tel que ce fut le cas lors de l'expérience afghane) et de renforcer ainsi un scénario « croyants » versus « mécréants » ?

B.K.- L'anti-impérialisme est un sentiment resté très vivace parmi les peuples arabes. Je vous parle du Caire où je me trouve au moment de cet entretien. Le rapprochement égypto-russe et, par ricochet, le rapprochement égypto-syrien sont très palpables. Vous voyez partout des publicités de Gazprom dans la rue. Grâce à la découverte d’un vaste champ gazier au large des côtes égyptiennes et à l’inauguration du nouveau canal de Suez, l’Égypte peut à nouveau se rêver en puissance régionale libérée de la tutelle saoudienne.  Lors des élections législatives égyptiennes, des observateurs US liés au Carter Center  et à l'ONG « Democracy International » se sont vus refuser leur demande de visa. Le président al Sissi a déclaré son appui total à l'intervention russe en Syrie. L’axe Russie-Égypte-Syrie symbolise la solidarité chrétienne et musulmane bien plus que l’idée d’une guerre entre croyants et mécréants. En Syrie, Vladimir Poutine a même reçu un nom arabe à consonance musulmane: Abou Ali Poutine ! La Russie a une bonne réputation dans le monde arabe. Elle a toujours été du côté des nationalistes arabes contre le colonisateur occidental. Si nous sommes loin de la renaissance arabe et de l'esprit panarabe insufflé par Nasser, on constate toutefois une réelle volonté d'en finir avec le djihadisme, cancer des Arabes et des musulmans qui n'apporte que l'humiliation, la soumission, l'abrutissement, la violence et la stagnation.

Le DR.-  Plus précisément, vu que l'alliance « de facto » inspirée  par la Russie ne concerne que des pays à dominance chiite comme l'Iran et l'Irak, ainsi que des mouvements comme le Hezbollah ou les combattants irakiens d'obédience également chiite, ne risque-t-on pas de faciliter la tâche de l'intelligence américaine qui cherchera à donner au conflit le contenu d'une guerre de religion ?

L’Égypte est le plus grand État arabe du monde. L’Égypte est aussi le siège de la plus haute autorité sunnite dans le monde : Al Azhar. Et Al Azhar appuie pleinement le président Sissi dans sa lutte contre le terrorisme. Les nombreux Égyptiens sunnites avec qui j’ai parlé sont inquiets de la montée en puissance de Daech dans le Sinaï et se sentent solidaires à la fois de leur gouvernement et de celui d’Assad en Syrie. Certains de ces Égyptiens sont même des salafistes qui votent pour le parti al Nour, allié du président al Sissi… La guerre sunnite/chiite telle que présentée par la gigantesque manipulation médiatique en cours  n’existe donc que dans la tête de ceux qui veulent effectivement l’autodestruction du monde arabo-musulman, c’est-à-dire les USA et les groupes takfiristes tels que Daech ou le front al Nosra. Seuls les idéologues proches du renseignement US et du quai d’Orsay, ainsi que leurs alliés djihadistes qui rêvent d’épuration religieuse, ont intérêt à une telle division confessionnelle. Au final, c’est l’Axe de la Résistance (une coalition de pays non alignés aux USA et à Israël) dominé par les chiites et respecté par de nombreux sunnites que ces idéologues veulent liquider.

Le DR.-  Lors des débats aux Nations Unies, on a eu l'impression que François Hollande avait une position encore plus anti-syrienne qu’Obama lui-même. N'est-ce pas une confirmation de l'influence des lobbys sionistes et des intérêts des monarchies du Golfe dans la politique internationale française ? Influence personnifiée notamment par Laurent Fabius ?

B.K.- Fabius représente en effet la convergence des intérêts des deux entités les plus nuisibles à la paix en Orient, à savoir Israël et l’Arabie saoudite. La visite à Riyad de Manuel Valls, agent déclaré d’Israël, confirme ce rôle doublement criminel joué par l’élite française contre les intérêts des peuples. Ajoutez à cela la dernière déclaration d’amour à Israël du prince saoudien Walid Bin Talaal, dans laquelle ce dernier ose affirmer que dans le cas d’une nouvelle intifada, son pays soutiendra Israël, et la boucle est bouclée. Il n'est donc pas excessif de dire que l’Arabie saoudite, Israël et la France sont trois nations en guerre contre l’Iran, la Syrie et le Yémen. De son côté, ayant perdu pied en Orient, Washington joue plutôt la prudence. 

Le DR.-  Quid du rôle de la Turquie dans ce conflit ?

B.K.- Il est difficile de parler du rôle de la Turquie tant les intérêts de la minorité au pouvoir priment sur ceux de la nation. Au début, le régime Erdogan rechignait à s’impliquer dans la guerre de Syrie. Ankara et Damas vivaient une véritable idylle sur le plan économique et politique. Conseil des ministres mixte, levée des barrières douanières, projet de TGV entre Gaziantep en Turquie et Alep en Syrie… Rien ne laissait présager un tel état de guerre entre la Turquie et la Syrie. Et puis un jour de mars 2011, le directeur de la CIA Leon Panetta est arrivé à Ankara avec son nouveau plan pour la Syrie, celui du « Regime Change ». Erdogan, le grand chef d’État « qui ne craint qu’Allah », s’est honteusement soumis à ses maîtres. Il a même été plus loin. Erdogan s’est imaginé calife. Il ne parlait plus que de la gloire de l’Empire ottoman et a même promis à ses sympathisants, toujours plus galvanisés par le discours religieux, de prier dans la grande mosquée des Omeyyades, une fois la Syrie débarrassée d’Assad. Dès l’été 2011, Erdogan a accueilli les miliciens anti-Kadhafi « pour raisons médicales ». Ces vétérans ont été les premiers djihadistes internationaux venus encadrer les déserteurs syriens. La rencontre entre les terroristes libyens et les déserteurs syriens s’est déroulée à Hatay (Antioche) en Turquie. On connaît la suite. Erdogan a fait de la Turquie le carrefour du terrorisme international avec le consentement de la CIA. Les djihadistes européens,  les agents de la DGSE envoyés par Hollande, les hommes du sénateur McCain ont emprunté les mêmes axes routiers pour rejoindre la Syrie. Erdogan a tout simplement transformé la Turquie en autoroute sans péage du djihad.

Le DR.-  Les  élections en Turquie de juin 2015 ont consacré une diminution sensible du soutien populaire aux politiques d'Erdogan et une progression importante du « Parti démocratique des peuples » (HDP), censé être largement composé de citoyens kurdes ou de leurs sympathisants. Quelles sont les positions du HDP concernant la Syrie ?

B.K.-  Le HDP est une coalition de gauche dominée par l’ancien BDP, un parti kurde de masse, vitrine politique du PKK, l’équivalent du Sinn Fein par rapport à l’IRA ou de Batasuna par rapport à l’ETA. De nombreux partis de la gauche marxiste turque composent également cette alliance. Comme dans toute coalition, des sensibilités différentes s’expriment au sein du HDP. Si la direction du HDP est globalement anti-Assad, des milliers de sympathisants du HDP expriment ouvertement leurs sympathies envers l’armée syrienne et même envers Assad. Les partis de gauche turque et kurde sont majoritairement peuplés d’alévis, une hétérodoxie progressiste issue de l’hétérodoxie chiite et, pour cette raison, fortement méprisée par les élites sunnites turques. Malgré leurs différences théologiques, les minorités alévies turques et kurdes se sentent solidaires des alaouites de Syrie victimes d’un véritable génocide ignoré ou délibérément minoré par les apôtres des droits de l'homme en Occident. Les alévis de Turquie considèrent Assad comme un dirigeant laïc protecteur des minorités et comme un contrepoids par rapport au régime d’Erdogan méprisant et hostile envers les minorités religieuses. Le leader du HDP Selahattin Demirtas est conscient de compter de nombreux alévis parmi ses soutiens ; il a donc plutôt tendance à ménager ses critiques envers le gouvernement syrien. Le HDP pro-kurde a toujours eu une position ambiguë à l’égard de la Syrie, à la fois critique de l’autoritarisme du système Assad et reconnaissant d’avoir accueilli la direction du PKK pendant près de 20 ans.  Cette ambiguïté est palpable sur le terrain militaire syrien. Des accrochages surviennent parfois entre les forces kurdes (YPG) et l’armée syrienne. Mais globalement, Kurdes pro-PKK et Syriens pro-Assad se soutiennent mutuellement face au Front al Nosra à Cheikh Maqsoud, un grand quartier kurde d’Alep, et face à Daech à Hassaké dans le Nord-Est du pays.

Le DR.-  Est-ce que la campagne anti-kurde d'Erdogan, sous prétexte de combattre le terrorisme, n'est pas une manière de cacher son soutien aux islamistes, et ce avec – pour le moins – la complaisance de l'Occident et de l'UE ?

C'est une évidence. Erdogan s'est réjoui de la chute imminente de la ville kurde de Kobané en Syrie avant de devoir manger son chapeau... Il a laissé les kamikazes de Daech se faire exploser au milieu de meetings de la gauche pro-kurde à Diyarbakir, Suruç et Ankara, massacrant près de 150 manifestants et en blessant près de 400... Il a concentré ses frappes sur le PKK et sa branche syrienne, les YPG. La Turquie est truffée de bases et de cellules dormantes de Daech. Erdogan a même fait arrêter les procureurs et les gendarmes turcs qui ont perquisitionné les camions remplis d'armes offerts par ses agents aux terroristes en Syrie. C'est la fameuse histoire des poids-lourds de la MIT (service de renseignement turc lié au cabinet du Premier ministre). À ce moment, le néo-calife néo-ottoman qu'il rêve de devenir dans ses délires a fermé les yeux sur un immense trafic de nitrate d'ammonium vers les zones contrôlées par Daech, officiellement à des fins purement « agricoles ». Comme on le sait, le nitrate d'ammonium n'est pas un simple engrais. C'est surtout un puissant explosif. Ses agents n'affichent aucune volonté de démanteler ces réseaux car ils lui sont utiles pour soutenir les terroristes en Syrie tout en les utilisant contre l'ennemi intérieur, c’est-à-dire les forces de la gauche turque et kurde et plus largement l'opposition démocratique du pays.

Propos recueillis par Vladimir Caller

L'interview a été publiée dans le Drapeau Rouge n° 53 de novembre-décembre 2015.

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Accord Grèce – Troïka : Déclaration du Bureau politique

L'accord signé ce 13 juillet entre les représentants des pays de la zone euro et le gouvernement grec est d'une importance exceptionnelle. Il consacre de manière tout à fait cristalline la nature dictatoriale des rapports entre la troïka, ses commanditaires de la finance internationale et les peuples qui font partie du projet européen.

  

Nous avons, depuis toujours, condamné l'absence de légitimité démocratique des instances de l'UE mais cette fois, à cette absence, ces instances ajoutent la volonté de punir un peuple, de heurter sa dignité même. Ainsi, ils aggravent radicalement, en seulement quelques jours, les conditions du mémorandum qu'ils avaient soumis au gouvernement grec avant le référendum.

  

Ce sont justement les résultats de ce référendum qui sont, à notre avis, à l'origine de la décision des dirigeants de la zone euro, dûment commandée par l'Allemagne avec la complicité de François Hollande, de chercher l'humiliation du peuple grec via un accord résolument abject. D'où notre condamnation sans réserves de ce comportement dictatorial qui constitue un précédent du mode d'emploi que l'UE se propose d'infliger à tous les peuples européens. Et nous regrettons que le gouvernement grec ait accepté de le signer en ouverte contradiction avec le mandat qu'il avait reçu de la population lors de son élection et lors du référendum.

  

Nous croyons enfin qu'il est grand temps que la gauche radicale mette sur la table la question de savoir s'il est cohérent de vouloir, à tout prix, rester dans la zone euro et ses contraintes tout en se proposant de combattre les politiques d'austérité.

  

Bruxelles, le 4 août 2015

 

Le Bureau politique du Parti Communiste

 

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