Mélenchon, Laurent et Tsipras, la photo de famille de la gauche radicale

Jean-Luc Mélenchon, Alexis Tsipras (leader du parti grec Syriza) et Pierre Laurent, le 21 mai à Paris.


C'était l'affluence des grands jours, lundi 21 mai, pour la conférence de presse conjointe entre Pierre Laurent, secrétaire national du PCF et président du Parti de la gauche européenne (PGE), Jean-Luc Mélenchon, l'ex-candidat du Front de gauche à la présidentielle, et l'invité du jour, Alexis Tsipras, le leader grec de la gauche radicale et vice-président du PGE.

Plus de 70 journalistes avaient fait le déplacement à l'Assemblée nationale, où se tenait la conférence de presse, pour écouter celui dont la coalition, Syriza, est donnée favorite aux élections du 17 juin. Sous les crépitements des flashs, Pierre Laurent a d'emblée dénoncé "les politiques d'austérité injustes qui conduisent dans l'impasse l'Europe" et appelé à "s'émanciper de la tutelle des marchés financiers" avec un rôle nouveau de la Banque centrale européenne qui prêterait directement aux Etats au même taux qu'aux banques. "Il n'y a pas de solution en Europe qui continue à s'exonérer du vote démocratique de ses peuples", a-t-il ajouté, en référence au choix des Grecs de faire de Syriza la deuxième force politique du pays avec 17,8 % des voix aux législatives du 6 mai, juste derrière Nouvelle Démocratie (centre-droit), et devant les socialistes.

"Faire preuve de réalisme"

Avec Syriza, "nous ne sommes pas identiques mais nous sommes comparables", a poursuivi Jean-Luc Mélenchon, un sourire jusqu'aux oreilles. Dénonçant les menaces de sortir la Grèce de l'euro, il a appelé les dirigeants européens à "faire preuve de réalisme", les traités ne permettant pas selon lui une telle éventualité. "Il faut accepter l'idée et se préparer à comprendre que si les Grecs votent pour Syriza, c'est pour rompre avec le mémorandum, pas pour l'appliquer", a-t-il déclaré tout en soulignant "l'ostracisation" dont est victime, selon lui, M. Tsipras. "Au moins la solidarité à gauche devrait prévaloir", a-t-il conclu.

Lors de sa courte visite française, M. Tsipras n'a en effet été reçu ni par le PS ni par François Hollande. Mais il n'a pas semblé s'en offusquer, évoquant le "protocole" pour excuser le nouveau président français. "Un de nos objectifs est de forcer les dirigeants européens à regarder la réalité en face", a-t-il lancé, expliquant "qu'aucun peuple ne peut être conduit à une sorte de suicide volontaire".

"Expérimentation européenne de solution néo-libérale de choc"

M. Tsipras n'a pas mâché ses mots pour dénoncer les conséquences des plans d'austérité dans son pays. "On a l'habitude de parler des programmes d'austérité mais en Grèce, ce n'est pas un simple programme d'austérité, a-t-il expliqué. Il s'agit d'une expérimentation européenne de solution néo-libérale de choc qui a conduit mon pays à une crise sans précédent d'allure humanitaire." "Si cette expérimentation continue en Grèce, elle sera exportée dans les autres pays européens", a-t-il estimé, en dénonçant "la guerre entre les forces du travail et les forces invisibles que sont la finance et les banques".

"Il est difficile d'affronter victorieusement notre ennemi car notre ennemi n'a pas de visage, pas de programme, pas de parti et pourtant, c'est lui qui gouverne", a-t-il ajouté. Des mots qui rappellent ceux de François Hollande, le 23 janvier au Bourget, qui avait déclaré, à propos du monde de la finance : "Dans cette bataille qui s'engage, mon véritable adversaire n'a pas de nom, pas de visage, pas de parti mais il gouverne, cet adversaire c'est le monde de la finance."

Interrogé sur l'idée d'un référendum sur la sortie de la Grèce de l'euro, qui aurait été proposé par Angela Merkel, ce que Berlin a démenti, M. Tsipras a expliqué que "la Grèce est un pays souverain". "Ce n'est pas à Mme Merkel de décider si nous allons vers un référendum ou non", a-t-il ajouté. Voulant adresser "un grand message d'espoir" aux Européens, il a souhaité envoyer "aux oubliettes de l'Histoire" le mémorandum sur l'austérité pour aller vers une "refondation" de l'Europe. "Il n'y a rien à négocier dans le mémorandum car on ne négocie pas l'enfer", a-t-il conclu.

Les leaders de gauche radicale se sont ensuite retrouvés pour une courte réunion publique à côté de l'Assemblée nationale, devant 200 à 300 personnes.

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