Contrôle budgétaire, fariboles et compagnie

Publié dans ACJJ

Alors que les nantis font leur pelote, en clair, gonflent le cœur léger, leur très confortable bas de laine, il n’est question que d’économies à tous les niveaux de pouvoir. Comme quoi l’austérité - le joli euphémisme – cela ne vaut pas pour tout le monde. Regardez le cas de Didier Bellens : le patron de l’entreprise publique Belgacom depuis 2003 (on comprend qu’il s’accroche à ce fromage gouteux) a empoché 2,6 millions d’euros de bonus (donc en plus de sa rémunération) l’an dernier. Brut, d’accord. Mais l’honnête homme s’en satisfait. Après tout, il avait déjà palpé autant en 2010. Et ne venait plus qu’en septième position, derrière ses collègues d’UCB, Delhaize, GBL et consort, alors qu’il menait le bal en 2008. Indécent dans le public ? Le conseil d’administration de Belgacom avait alors « raboté » son salaire d’une vingtaine de pourcent Ce que le ministre de tutelle, Paul Magnette, appelle « moraliser » ces revenus aussi indécents qu’injustifiés. C’est Le Soir qui rapportait récemment ces chiffres, signalant au passage que, côté privé, Jean-Luc Dehaene, dirigeant du Mouvement ouvrier chrétien dans une autre vie, a reçu 4 millions d’euros des mains du géant de la brasserie belgo-brésilienne AB Inbev où il fut administrateur.

Démocratique, tout cela ? A titre d’exemple, le chief d’AB Inbev, société cotée à la bourse de Bruxelles, a reçu 4,4 millions. Scènes de la vie quotidienne du big business. Certains s’émeuvent ici et là. Quelques hommes politiques évoquent la possibilité d’une mise sous tutelle des rémunérations et bonus. Le député PS Yvan Mayeur parle, toujours dans le quotidien, de « gavage », de « cupidité », d’ « arrogance impunie » et rappelle que le patron de Delhaize se fait verser 123 fois le salaire d’une caissière. Récemment, un parlementaire flamand a osé dire que, dans les entreprises publiques, « il faut un écart sain entre les petits et les gros salaires. »Trop, c’est trop ? Et après ? N’est-ce pas inhérent au système auquel aucun grand parti n’entend toucher ?

Comme Sarkozy ?

Rien de nouveau sous le soleil. Les friqués jubilent, les autres… Et pendant ce temps, le bon peuple est appelé à jouer les spectateurs consentants. A la mi-mars, le gouvernement a présenté à grand renfort de flonflon le dernier avatar du budget 2012, histoire de respecter les règles européennes dictatoriales. Sous le slogan : le citoyen lambda en sort sain et sauf. En décembre, l’exécutif avait décidé 11,3 milliards d’économie. Il vient d’y ajouter 2,5 milliards et mis de côté 650 millions au cas où. Cela vaut une mise en perspective.

Chez les libéraux, on se réjouit d’avoir en place un gouvernement de centre-droit et l’on demande maintenant un plan de relance calqué sur la politique sarkozienne, notamment par de nouveaux cadeaux fiscaux aux entreprises comme condition pour créer de l’emploi. Une antienne usée et qui ne s’est guère concrétisée à ce jour. Les socialistes ont riposté en se posant en rempart, en défenseur de l’Etat social : le budget, disent-ils, est le plus social d’Europe. Il n’est ni de gauche, ni de droite, dit-on partout. Neutre ? Certes, par exemple, l’index est sauf (bien que tant de fois manipulé au fil des années) pour l’heure. La Banque nationale fait la liste des produits qu’il faudrait éjecter du système (pétrole, gaz ou électricité) et à l’oreille du gouvernement. L’ « effort » fiscal mesuré (les accises sur le tabac vont augmenter de quelques centimes). Les prix de l’énergie (mais pas les carburants expulsés de l’index depuis belle lurette) et de certains médicaments devraient diminuer. Il y aura une légère augmentation de la taxe sur les opérations  boursières. La sécurité sociale échappe aux attaques libérales. Le précompte professionnel ne sera pas
(encore?) relevé. Et des tas d’économies sont soudain possibles. Hosannah ?

Maurice Magis, chargé de la communication à l’ACJJ

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